Le début de la fin pour Shea Weber?
Le papa des Canadiens de Montréal offre actuellement des performances bien en deçà des attentes. Même s’il n’est plus le défenseur étoile qu’il a jadis été, le Britanno-Colombien de 35 ans obtient le temps de jeu d’un premier défenseur. Est-il temps que Weber occupe un rôle diminué au sein de l’équipe?
Situation contractuelle
En 2012, Weber signait un des plus gros contrats de l’histoire de la LNH avec les Predators de Nashville : 14 ans, pour une valeur totale de 110M$. L’impact de son contrat sur la masse salariale du CH est donc de 7 857 143 $, une somme comparable aux contrats octroyés à Jacob Trouba et Thomas Chabot (8M$) ainsi qu’à Aaron Ekblad (7,5M$). Son contrat se terminera donc au terme de la saison 2025-2026. Toutefois, si Weber décidait de prendre sa retraite avant la fin de son contrat, Nashville assumerait les 7,8M$ de ce dernier.
Même si sa présence dans le vestiaire ne se mesure pas en somme d’argent, je ne crois pas me faire beaucoup d’ennemis en avançant que Weber ne mérite plus un tel salaire, loin de là. Et lorsqu’on s’attarde aux déboires récents du Tricolore, il est difficile d’envisager que le jeu de Weber n’ait pas un impact sur les résultats de l’équipe. Lorsque questionné sur une réduction potentielle de son temps de jeu en raison de la saison condensée, Weber a répondu : « Je n’ai jamais pensé à cela. J’aimerais jouer plus, si possible, si j’en ai l’occasion ». Il apparaît donc évident que Weber pense encore être en mesure d’aider le CH dans sa course vers les séries éliminatoires, même si tous les signes pointent dans le sens inverse.
Un déclin progressif
Ses performances décevantes ne sont toutefois pas apparues cette saison : elles sont le fruit d’un déclin qui s’est opéré au cours des dernières années et qui se remarque de plusieurs façons, outre les statistiques. Weber, qui n’a jamais été connu pour sa mobilité impressionnante, semble, cette saison, avoir plus de difficulté à suivre le rythme de jeu d’une ligue qui ne cesse de s’accélérer. Le numéro 6 du Bleu-blanc-rouge a toutefois été en mesure de compenser ce manque de vitesse par un positionnement intelligent sur la patinoire. C’est donc dire que si Weber est en mauvaise position, il ne pourra pas récupérer avec sa vitesse, et c’est exactement ce qui se produit en 2021. Il semble avoir beaucoup de difficulté à lire le jeu, et si Price pouvait réparer ses erreurs dans les années passées, ce n’est plus le cas cette année. Résultat : on remarque de plus en plus les erreurs coûteuses de Weber.
Sa prise de décision a aussi considérablement ralenti, en particulier cette année. Weber prend des risques inutiles et est trop lent pour réagir, ce qui mène à des buts pour l’adversaire. Prenons cet exemple d’un revirement créé par Shea Weber qui a mené à un but de Mathieu Perreault, des Jets de Winnipeg.
Lorsque Weber contourne le filet, ses yeux sont rivés sur la rondelle. Il n’est donc pas en mesure d’évaluer ses options. Le jeu simple aurait été de refiler la rondelle à Artturi Lehkonen sur la bande. Au lieu de cela, Weber décide de couper au centre de la glace et, lorsqu’il aperçoit Perreault, il est trop lent pour réagir, ce qui mène à un but des Jets. Donnons le crédit à Perreault, qui a effectué un jeu brillant afin de marquer. Il reste tout de même que Weber a commis deux erreurs dans sa lecture de jeu : il n’a pas réalisé que son ailier était en position pour effectuer une sortie de zone et n’a pas levé la tête pour évaluer ses options en contournant le filet.
Cet exemple n’est qu’un faible reflet d’une tendance inquiétante qui s’est installée pour Weber : une incapacité de faire une bonne première passe en sortie de zone. Son coup de patin ayant ralenti, il n’est plus en mesure de se créer de l’espace pour passer le disque à ses attaquants. Il reste donc la plupart du temps emprisonné dans sa zone durant de longues minutes.
Weber en chiffres
Outre ce que les amateurs et les experts ont pu observer sur la glace, les statistiques de Weber confirment qu’il n’est plus un joueur d’impact. Ses 18 points en 40 rencontres représentent sa plus faible moyenne de points par match depuis 2007-2008, alors qu’il n’avait que 22 ans, et idem pour son temps de jeu (22:43). Sa moyenne de tirs bloqués par rencontre (1,425) est à son plus bas depuis la saison 2010-2011 et sa moyenne de mises en échec par rencontre (1,5) représente le pire taux de sa carrière. Son nombre de revirements créés par rencontre (0,2) est à son plus bas depuis 2016-2017 et ses revirements accordés par match depuis son arrivée avec le CH ont doublé depuis son séjour à Nashville (1,12 contre 0,57).
Pourtant, mise à part une petite réduction de temps de jeu de 1:17 comparément à la saison dernière, rien ne semble avoir changé dans l’utilisation que fait Dominique Ducharme de Shea Weber. Il commence pratiquement le même nombre de séquences en zone adverse (49,4% vs 50%). En fait, les seules choses ayant changé sont son temps de jeu en avantage numérique, qui a augmenté de 13 secondes, et son temps de jeu en désavantage numérique, qui a diminué de 50 secondes. Il est cependant constamment sur la patinoire afin de contrer les meilleurs trios adverses, et ce, soir après soir.
Ses tirs au filet par rencontre (2,15) et son pourcentage d’efficacité au tir sont à leur plus bas depuis 2006-2007 et 2007-2008 respectivement. Ses buts créés par rencontre (0,16) sont aussi à leur plus bas depuis 2007-2008 et ses minutes de pénalité par rencontre sont à leur plus haut depuis 2014-2015, alors qu’il jouait avec Nashville. Ses xGF (buts pour attendus) sont aussi à leur plus bas depuis que la statistique a été introduite, en 2014-2015. Son Corsi relatif est à -1% et son Fenwick relatif, à -0.4%, ce qui veut dire que les Canadiens de Montréal contrôlent un moins grand nombre de tirs au but lorsqu’il est sur la patinoire. Ses contributions de points offensifs et défensifs sont à leur plus bas depuis 2017-2018. J’ai tenté tant bien que mal de trouver des statistiques positives pour Shea Weber cette saison, mais je n’ai rien trouvé.
Quoi faire?
Pour le reste de la saison, il serait primordial que le CH réduise son temps de jeu de façon dramatique. Alexander Romanov, même s’il en est qu’à sa première saison, montre des signes impressionnants et pourrait en prendre un peu plus sur ses épaules. Le retour de Ben Chiarot et les nouveaux venus Jon Merill et Erik Gustafsson vont aussi pouvoir combler un manque à la ligne bleue du Tricolore. En attendant le repêchage d’expansion du Kraken de Seattle, on ne peut qu’espérer que Weber retrouve ses bonnes habitudes et ses jambes.