Le choc des titans : une rivalité générationnelle

Patrick Mahomes des Chiefs de Kansas City et Josh Allen des Bills de Buffalo se félicitent après un match en décembre dernier. Crédit photo : people.com

Sur le terrain des 100 verges, chaque génération a ses rivalités enflammées, que ce soit au niveau des équipes ou entre certains joueurs qui démontrent des aptitudes exceptionnelles. Peyton Manning et Tom Brady ont enflammé les années 2000 lors de duels enlevants. De nos jours, deux quart-arrières remarquables, Patrick Mahomes des Chiefs de Kansas City et Josh Allen des Bills de Buffalo, s’affrontent presque chaque année lors des éliminatoires de la NFL, dont un affrontement d’anthologie dimanche dernier qui passera à l’histoire pour le botté manqué de Tyler Bass. Analyse d’une rivalité en pleine effervescence dans la NFL.

La rivalité des Bills et des Chiefs a eu ses moments forts et d’accalmie au fil des décennies. Les deux équipes font partie des membres fondateurs de la Ligue américaine de football (American Football League : AFL), une ligue rivale de la NFL durant les années 1960. Dès le début, les deux formations se sont classées parmi les meilleures équipes. 

Les Bills ont remporté deux championnats de l’AFL (1964-1965) tandis que les Chiefs ont participé au premier Super Bowl en 1967 et ont remporté la quatrième édition en 1970. Toutefois, lors de la fusion des deux ligues en 1970, la rivalité s’est calmée dû aux performances en déclin des deux équipes entre 1970 et 1990.

Cependant, la rivalité a repris durant la décennie 90 avec les performances remarquées de l’attaque de Buffalo menée par le quart-arrière Jim Kelly, le receveur Andre Reed et le porteur de ballon Thurman Thomas. Du côté de Kansas City, le célèbre Joe Montana a rejoint l’équipe pour deux saisons en 1993 et en 1994, ce qui a mené à des duels remarquables, dont la finale d’association américaine pour la saison 1993 où Buffalo l’a remporté 30-10.

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Les Bills ont vécu des années sombres de 2001 à 2016 lorsqu’ils n’ont pas participé aux éliminatoires pendant 17 saisons. L’arrivée de Josh Allen a redressé la franchise. Du côté des Chiefs, le quart-arrière Patrick Mahomes, l’ailier rapproché Travis Kelce et l’entraîneur-chef Andy Reid ont repris une franchise en décrépitude pour la transformer en mastodonte de la conférence américaine.

Dès que les deux équipes ont commencé à dominer leurs divisions respectives, une rivalité s’est créée, autant en saison régulière que durant les éliminatoires de la NFL. Les deux athlètes ont été comparés, chacun ayant une préférence pour l’un ou pour l’autre : le bras de Mahomes contre le jeu au sol d’Allen. Néanmoins, une tendance se dresse entre Allen et Mahomes, soit une répétition du scénario des années 2000 où Peyton Manning ne réussissait que rarement à vaincre Tom Brady lors des matchs éliminatoires.

Le mur des éliminatoires

Trois matchs en quatre ans ont opposé Buffalo et Kansas City en éliminatoires, tous remportés par les Chiefs, ce qui a ranimé la rivalité entre les deux villes. Lors de la saison 2020, Allen et Mahomes ont croisé le fer lors de la finale de conférence de l’Américaine. L’attaque explosive des Chiefs a eu le dessus 38-24 au Arrowhead Stadium.

Le duel éliminatoire suivant est demeuré dans les livres d’histoire sous le nom des « 13 secondes ». Lors du deuxième tour des éliminatoires de 2021, les deux plus grands quart-arrières de cette génération ont enchaîné les longues passes, les jeux audacieux au sol et les multiples touchés. À 13 secondes de la fin, les Bills reprennent les devants 36-33. Toutefois, Patrick Mahomes a fait ce que tout quart-arrière de renom est en mesure d’effectuer. Avec trois temps d’arrêt à sa disposition, il réussit à amener le ballon juste assez près pour que le botteur Harrison Butker réussisse le botté de précision de trois points nécessaire pour créer l’égalité. En temps supplémentaire, Mahomes signe le coup de grâce avec un touché de Travis Kelce. Une victoire de 42-36 que les Bills n’ont guère digérée avec le temps.

Dimanche dernier, tout était en place pour un match revanche d’anthologie. Josh Allen n’a jamais autant couru de sa carrière avec 15 touchés au sol en une saison, égalisant le record de Cam Newton. Les Chiefs n’avaient peut-être pas l’attaque des dernières années, mais leur défense, menée par l’imposant Chris Jones, a réussi à les garder en vie. C’était le premier match de Patrick Mahomes sur la route, ce qui donnait un net avantage aux Bills où la foule bruyante du Highmark Stadium est réputée pour déranger les équipes à l’étranger.

Allen contre-attaque… et un scénario de déjà-vu

Les Bills ont remporté la bataille de la première demie avec deux touchés aux sols et une passe de touchée pour Josh Allen. Patrick Mahomes s’en est sorti grâce au retour en force de Travis Kelce qu’il n’avait pas connu sa meilleure saison en carrière avec un touché en fin de deuxième quart. Lors de la deuxième demie, Kansas City a repris le ballon et a démontré pourquoi elle était la championne en titre du précédent Super Bowl. Dès la première séquence, Kelce double son tableau de chasse avec un touché in extremis dans la zone des buts.

Dès lors, les vieux démons du passé ont hanté la fin de match des Bills. Une séquence en quatrième essai s’est avérée infructueuse. Même si les Chiefs ont échappé le ballon et qu’il s’est retrouvé dans la zone des buts, les Bills n’ont pas été capables de capitaliser, menant à un botté de dégagement.

Le philosophe et économiste allemand Karl Marx a dit : «L’histoire se répète, d’abord comme une tragédie, puis comme une farce. » Cette citation schématise avec précision la fin de match de Buffalo.

En 1991, au Super Bowl XXV opposant les Bills de Buffalo et les Giants de New York, Scott Norwood détenait le pouvoir d’inscrire les points supplémentaires pour remporter l’ultime championnat. Il devait effectuer un botté de précision de 47 verges. Malheureusement, le ballon s’est dirigé à droite des poteaux, ce qui a valu une défaite crève-cœur aux Bills. Ce même scénario s’est répété dimanche lorsqu’en fin de match, Tyler Bass se devait de réussir le botté de 44 verges pour créer l’égalité. À l’image même de son prédécesseur, 33 ans plutôt, le ballon est allé vers l’extérieur et les Chiefs ont sécurisé la victoire.

Ce match s’inscrit dans l’histoire de la rivalité comme un nouveau point tournant. Est-ce que Josh Allen réussira un jour à détrôner Patrick Mahomes et ainsi, participer au Super Bowl ? Car un quart-arrière du talent de Josh Allen ne peut se permettre une carrière se limitant à une présence très courte lors des éliminatoires. Si Peyton Manning a réussi à vaincre Tom Brady seulement après sa septième rencontre, l’intensité du prochain duel en éliminatoire entre Allen et Mahomes sera digne d’un Super Bowl.

Pierre-Alexandre Larouche

Sportif de salon depuis sa tendre enfance, Pierre-Alexandre Larouche est étudiant au baccalauréat en communication (journalisme) à l'UQAM. Maniaque de statistiques, de dates et capable de nommer les 56 champions du Super Bowl par coeur, Pierre-Alexandre s'est joint au Club-École pour joindre ses deux passions que sont l'écriture et le sport. Amateur de football américain, d'hockey et de baseball, il est à la recherche de sujets méconnus et adore débattre sur les sujets chauds de l'actualité sportive.

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