Afrique du Sud : un dernier combat pour unir une nation

Le capitaine sud-africain Siya Kolisi (à gauche) et ses partenaires chantant l’hymne sud-africain avant un match de préparation au Mondial. Crédit photo : Fédération sud-africaine de rugby

L’Afrique du Sud est en finale de la Coupe du monde pour la deuxième fois d’affilée après deux victoires à l’arraché. Ce samedi 28 octobre, au Stade de France, les Springboks ne joueront pas que pour une victoire de prestige, mais bien pour rassembler tout un pays.

C’est un fait, l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande sont les deux seules équipes de rugby dans le monde à détenir trois Coupes du monde et elles se disputeront un quatrième titre mondial qui fera du gagnant la plus grande nation de ce sport. 

Peu de gens avaient prévu une telle affiche pour clôturer ce mondial. L’hégémonie de l’hémisphère Sud était destinée à être brisée et de nombreux spécialistes voyaient ainsi l’Irlande et surtout le pays hôte, la France, aller jusqu’au bout.

Le combat des Sud-Africains en a décidé autrement. À deux reprises, les Boks ont dû s’employer pour rester en vie dans cette compétition. Ils ont battu les Français en quart de finale 29 à 28 avant de s’imposer encore une fois par la plus fine des marges contre l’Angleterre en demi-finale 16 à 15.

S’appuyer sur la dynamique de 2019

Le 2 novembre 2019, les Sud-Africains avaient gagné l’édition précédente à la suite d’une victoire inattendue contre ces mêmes Anglais qui étaient donnés largement favoris après avoir éliminé les Néo-Zélandais en demi-finale.

Le trophée avait été soulevé par Siya Kolisi, le capitaine emblématique des Springboks. Ce dernier a, en effet, grandi dans les fameux townships sud-africains, ces bidonvilles créés durant l’apartheid pour les Sud-Africains non-blancs qui ont subi la ségrégation raciale durant cette période sombre du pays. Il est le premier capitaine noir de l’équipe du pays arc-en-ciel.

Une finale d’anthologie s’annonce entre ces deux équipes qui se sont déjà affrontées une fois à ce stade de la compétition. C’était en 1995, les Springboks avaient obtenu un gain de 15 à 12 sur les All Blacks

Au sortir de l’apartheid, le monde avait été marqué par cette scène de Nelson Mandela, président de l’Afrique du Sud, décernant le trophée à l’équipe sud-africaine tout en étant acclamé par soixante-mille personnes. Dans la culture populaire, le film Invictus, avec Morgan Freeman et Matt Damon, retrace cet événement qu’avait utilisé Mandela au début de son premier et unique mandat afin d’unir la nation sud-africaine par le sport.

Plus qu’un trophée

Cependant, plus de trente ans après l’abolition de l’apartheid, l’Afrique du Sud demeure toujours marquée. Le pays fait face à deux problèmes importants : des inégalités majeures et une criminalité élevée.

Le pays fait face à un taux de chômage élevé de 33 % et les séquelles de l’apartheid existent encore. Les familles les plus riches vivent dans des communautés privées, entourées de barbelés tandis que les plus pauvres doivent vivre dans des townships insalubres.

L’Afrique du Sud connaît trois meurtres par heure d’après la police sud-africaine. Selon la Banque mondiale, le pays enregistre une moyenne de dix homicides pour cent-mille habitants comparativement à presque zéro au Canada.

Mais dans ce pays aux onze langues officielles, lorsque l’équipe nationale de rugby joue, c’est tout un pays qui vibre. L’hymne national, chanté en chœur par les joueurs en xhosa, zoulou, sesotho, afrikaans et anglais, symbolise la diversité du pays.

Une victoire en finale pourrait continuer à faire démocratiser le rugby, encore cantonné parfois à certaines classes privilégiées dans ce pays. Siya Kolisi sait qu’une nouvelle victoire en Coupe du monde représenterait bien plus qu’un palmarès bien garni comme il l’avait dit avant le quart de finale.

« Notre équipe représente l’Afrique du Sud dans son ensemble, tous les différents horizons de vie qu’on y retrouve. Et c’est de là qu’on tire notre force. Bien sûr, on aime le rugby, on a tous nos objectifs personnels, mais ce qui nous rassemble, c’est de jouer pour l’Afrique du Sud, c’est elle qu’on veut rendre fière, inspirer », avait-il déclaré.

Ce qui est sûr, c’est que les Sud-Africains vibreront samedi à partir de 21h (15h, heure du Québec), de Soweto à Cape Town.

Clarence Bayet

Venu de la campagne française, Clarence adore le sport. Il a pratiqué le tennis et le soccer durant sa jeunesse. Ayant rêvé d'être pilote de Formule 1 et de suivre les pas de Lewis Hamilton, il s'est vite rendu compte que vivre sa passion à travers le journalisme est plus à sa portée. Aujourd'hui, il suit activement la Formule 1, le tennis, le rugby, le soccer et le basketball.

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