Assister à un match de soccer dans un stade presque vide

L’impact de Montréal accueillait les Whitecaps de Vancouver mardi dernier au Stade Saputo devant 250 partisans. Crédit photo : Courtoisie (Cédric Lacharité).

Après le 18 février, premier match officiel de la saison 2020 de l’Impact de Montréal, et le 9 juillet, premier match du Bleu-Blanc-Noir du tournoi MLS is back, la rencontre de mardi dernier des hommes de Thierry Henry avait des airs de troisième début de saison. C’était la première partie disputée au Stade Saputo depuis octobre dernier et un des premiers événements sportifs depuis mars à ne pas être disputé à huis clos. En effet, le club a libéré un total de 250 billets pour le bonheur d’une poignée de partisans. Comment s’est déroulé leur expérience de match dans ces conditions plus qu’étranges? Discussion avec des passionnés.

En premier lieu, comment faisait-on pour avoir accès aux fameux billets? L’Impact de Montréal a opté pour un système d’enchère, où le prix de départ était fixé à 49$ pour aller jusqu’à 225$ par entrée. Cette option a été décriée par plusieurs partisans, jugeant qu’elle favorisait les abonnés les plus nantis. Cependant, le prix moyen payé pour un billet a été d’environ 70$, les partisans contactés par Le Club-École ayant payé entre la mise minimum et 100$ par billet.

Cédric s’étonne cependant d’avoir réussi à obtenir deux billets à 49$ chacun alors que certains partisans sur Twitter auraient misé plus cher que lui : « J’aimerais vraiment que le club me clarifie comment j’ai été choisi. Des gens ont fait des mises plus élevées que la mienne. J’étais placé un peu plus haut que la moyenne. Est-ce qu’ils sont allés par fourchette de prix pour donner une chance à tous les portefeuilles? Je ne sais pas, mais le club gagnerait plus à communiquer là-dessus. »

Mesures sanitaires plus qu’adéquates

L’Impact de Montréal n’a pas lésiné sur les mesures d’hygiène au Stade Saputo. Prise de température à l’entrée, masques en tout temps (ou presque), désinfectant à mains à l’entrée de chaque section et respect de la distanciation de deux mètres entre chacune des personnes qui ne sont pas du même ménage. En ces termes, le pari est réussi du côté de la direction de Kevin Gilmore.

Cependant, selon certaines personnes présentes, la communication des nombreux agents de sécurité sur place a été déficiente : « On nous avait dit que, lorsque nous avions de la bière ou de la nourriture, on n’était pas obligé de mettre notre masque, comme au restaurant, explique un partisan. J’ai demandé à un agent si c’était correct que j’enlève mon masque avec ma bière, pas de problème. Je me suis fait avertir par la suite par une autre agente de remettre mon masque, même si je ne l’avais pas terminé. Va falloir qu’ils se parlent parce que ça ne fait pas sérieux. »

Belle rencontre en soi

En plus d’être le premier événement sportif professionnel à accueillir des partisans, les chanceux qui ont pu entrer dans le Stade Saputo en ont eu pour leurs 70$. Le Bleu-Blanc-Noir s’en est sorti avec une convaincante victoire de 2-0 face aux Whitecaps de Vancouver, question de faire sourire tous les amateurs de l’Impact, mais surtout les témoins de première ligne.

L’ambiance de match a été appréciée par la plupart des partisans présents. « Il y avait un groupe de quelques personnes qui essayaient de rendre l’atmosphère un peu plus normale, décrit Maxime. On criait un peu aussi, mais la majorité des gens étaient là pour regarder le match, plus tranquille. » Disons que dans une situation unique comme celle-là, il n’y a pas de mode d’emploi à savoir comment réagir. « On se sentait quand même privilégié d’être là », commente Nicolas.

Étant habituellement avec les 1642 MTL [le groupe de supporteurs où se trouve la cloche], j’avais oublié que c’était l’infâme Chelsea Dagger qui jouait quand l’Impact faisait un but. En temps normal, il y a trop de bruit et je ne l’entends pas. J’aurais préféré ne pas m’en rappeler (rires).

André, un des 250 chanceux de mardi dernier.

Le groupe de supporteurs Ultras Montréal 2002 s’est invité dans la partie pour donner un peu de vie à cette ambiance un peu terne. Plusieurs membres du groupe se sont réunis aux abords du Stade Saputo pour chanter, crier et allumer le ciel de quelques fumigènes afin d’encourager à leur manière. « On entendait Ultras, c’était cool », affirme Julien.

Les Ultras Montréal 2002 ont fait sentir leur présence aux abords du Stade Saputo mardi dernier. Crédit photo : Facebook (Ultras Montréal 2002).
Bruits artificiels

Depuis le déconfinement des sports professionnels et les matchs à huis clos, certains réseaux optent pour un bruit de foule artificiel pour mettre de l’ambiance à la télévision. Certains sports, comme les arts martiaux mixtes ou le hockey, préfèrent assumer cette absence d’ambiance et ne rajouter aucun artifice. Pour une première, les bruits de foule rajoutés n’étaient pas qu’à la télévision, mais bien dans le stade lui-même, au grand déplaisir de la majorité des partisans.

« J’aurais préféré qu’on accuse le fait que l’on soit 250 personnes », commente Julien. « Des fois, il n’y avait pas d’action et le DJ montait l’intensité, comme s’il y avait une échappée, renchérit un autre partisan. Le son n’avait vraiment pas rapport. C’était vraiment ordinaire. » Maxime va dans le même sens : « Je n’aime vraiment pas ça. L’atmosphère est déjà spéciale, ne la ruine pas avec des bruits qui ne sont pas correspondants avec ce qui se passe sur le terrain et avec un gros décalage sur l’action. » À savoir si c’est une directive de la MLS ou de l’Impact de Montréal, mais cette idée est à revoir.

À recommencer?

Mis à part cet élément d’ambiance qui serait à peaufiner, voire à éliminer dans le Stade Saputo, André, qui était déjà curieux et excité de retourner dans son stade favori après 10 mois d’absence, recommencerait l’expérience demain matin. Cédric a convaincu plusieurs amis et a même ses billets pour le match de vendredi soir. La majorité des partisans que Le Club-École a contactée abonde dans le même sens. Cependant, Julien y est allé d’un tout autre commentaire : « Jamais de la vie. Je voulais vivre le truc une fois, mais je vais attendre. Je crois que ça pourrait rester très sécuritaire avec 3000 ou 4000 personnes dans le stade. À ce moment-là, j’y retournerais sûrement, mais d’ici là, je vais regarder à la télévision. »

Report possible du match de vendredi

Alors que l’Impact de Montréal se prépare à accueillir le Toronto FC vendredi, au Stade Saputo, il se pourrait bien que la rencontre n’ait pas lieu dans un futur proche. Suite à l’acte de brutalité policière dont a été victime Jacob Blake, un Afro-Américain qui a été tiré dans le dos à sept reprises par un policier de la ville de Kenosha, au Wisconsin, la NBA, mené par les Bucks de Milwaukee, a décidé d’annuler ses activités pour une durée indéterminée.

Quelques matchs dans la MLB ont aussi été reportés et la MLS, suite à la pression de ses joueurs, a annulé la quasi-totalité de ses matchs, la rencontre entre Orlando et Nashville ayant déjà été entamée au moment de la prise de décision. Bruits de criquets chez la LNH, alors que le ton monte chez plusieurs joueurs.

Bref, il serait logique et bien vu de voir la MLS reporter ses activités pour les prochains jours, et la rencontre entre l’Impact de Montréal et le Toronto FC pourrait donc se jouer ultérieurement.

Étienne Bouthillier

Étudiant en journalisme à l'UQAM, Étienne Bouthillier tombe amoureux du soccer lors de la Coupe du Monde 2014. Ses premiers pas dans le monde des médias remontent à 2016, où il écrit des articles pour le Kan Football Club pendant deux ans. En 2018, il se lance dans le monde du podcast avec « Les Trois Lions », un balado sur le foot anglais. Il a animé l'émission hebdomadaire du Kan Football Club sur CHOQ.ca. Il est aussi impliqué dans les activités du Royal de Montréal, l'équipe professionnelle d'ultimate frisbee de la métropole. Ses champs d'expertise sont le soccer, l'ultimate frisbee, les arts martiaux mixtes et le sport sécuritaire.

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