L’ère des statistiques avancées

Dom Luszczyszyn (gauche), Kyle Dubas (centre) et Jim Nill (droite) sont tous de fervents utilisateurs des statistiques avancées. Photo : Chris Young via Twitter / Smiley N. Pool (La Presse canadienne) / DallasNews (Getty Images).

Les statistiques au hockey, comme les tirs au filet ou les mises en jeu remportées, sont un bon outil afin d’évaluer les performances des joueurs. Depuis quelques années, cependant, une analyse plus en profondeur des chiffres permet aux analystes et aux journalistes de mieux saisir l’impact d’un joueur. C’est là qu’entrent en jeu les statistiques avancées, des statistiques plus approfondies utilisant des mesures moins conventionnelles.

Plusieurs journalistes utilisent déjà les statistiques avancées afin de contextualiser les performances des joueurs de la LNH. C’est le cas de Dom Luszczyszyn, un journaliste pour le média The Athletic, qui se donne la mission de simplifier celles-ci. Il est un des très rares journalistes possédant la capacité de les traduire pour les amateurs de sport, notamment via son compte Twitter. Il publie de façon hebdomadaire des compilations de données avancées de la LNH à ses abonnés, tentant simultanément de les expliquer à ces derniers.

Au Québec, les journalistes et chroniqueurs utilisant les statistiques avancées dans leurs articles sont quasi inexistants. Non seulement sont-elles difficiles à comprendre, mais leur utilité est constamment mise en doute par les partisans, les joueurs et même les dirigeants de la ligue. C’est notamment le cas de Drew Doughty, le défenseur des Kings de Los Angeles, qui s’est emporté en voyant qu’il ne ferait pas partie de l’équipe olympique selon quelques journalistes, en raison, entre autres, du déclin de ses statistiques avancées au cours des dernières années. « Beaucoup de gens ne me considèrent même plus comme un bon joueur, a-t-il récemment déclaré. Je vois des gars qui ne m’ont pas [inscrit] pour faire partie de l’équipe olympique. Et ça me frustre. » Sa haine envers les statistiques avancées n’est toutefois pas récente. En 2014, il avait déclaré : « Je crois que, le Corsi, c’est un tas de merde, personnellement. »

Ce que Doughty exprime ne lui est pas exclusif : beaucoup d’autres joueurs semblent penser que les statistiques avancées ne sont pas efficaces parce qu’elles ne montrent qu’un seul côté de la médaille. Il y a deux ans, Ben Chiarot avait partagé une opinion sensiblement similaire : « Il y a plus que ce que les analyses montrent pour plusieurs joueurs. Cela ne vous donne pas toujours une image complète. » Il reste qu’elles sont largement utilisées partout à travers la ligue, non seulement par des dirigeants, comme Kyle Dubas et Jim Nill, mais aussi par des analystes, comme Dom Luszczyszyn. Cela soulève donc une question importante : ont-elles leur place dans l’analyse des performances des joueurs?

Ni noir, ni blanc

Il devient facile de balayer ces mesures du revers de la main, sous prétexte qu’elles ne peignent pas un portrait fidèle des performances des joueurs. Isolées, ou prises hors contexte, il est vrai qu’elles peuvent induire en erreur, ou même faire en sorte qu’on saute à des conclusions erronées quant à un joueur. Par exemple, un analyste ne connaissant pas Connor McDavid s’apercevant qu’il a eu un Corsi de 48,4% en 2019-2020 pourrait en déduire que, lorsqu’il est sur la patinoire, son équipe se fait dominer, ce qui n’est pas le cas. Une erreur similaire pourrait être réalisée avec Phillip Danault, qui a eu un Corsi de 59,5%, l’un des meilleurs de la ligue. On pourrait en déduire qu’il est un des meilleurs joueurs au monde, ce qui n’est pas le cas. Cela signifie que les statistiques avancées ne veulent rien dire? Non.

Pour bien utiliser et comprendre celles-ci, il faut les contextualiser. Non seulement faut-il comprendre que McDavid joue avec une équipe de bas de classement, mais aussi que Danault joue dans un système de jeu qui favorise la possession de rondelle. Il faut aussi les combiner avec d’autres mesures, afin de bien comprendre l’impact d’un joueur. Individuellement, les statistiques avancées peuvent être trompeuses, mais mises en contexte avec la situation du joueur et en évaluant d’autres mesures connexes, telles que les buts pour attendus (xGF), les départs en zone offensive (%OZS) et le PDO, un portrait plus précis et révélateur peut être peint.

Candidats à une saison d’éclosion

En utilisant quelques statistiques avancées, j’avais identifié cinq candidats potentiels à une saison d’éclosion en 2021. Pour le moment, mes prédictions s’avèrent exactes. Miro Heiskanen a récolté 7 points en 9 rencontres, Kevin Fiala produit à un rythme équivalent à une saison de 30 buts et Nick Suzuki a récolté un point par match. Andrew Mangiapane est en route pour une première saison de 40 points (sur 82 matchs) et Kasperi Kapanen produit à un rythme de 60 points pour une saison complète. La saison est encore jeune, mais les résultats obtenus jusqu’à présent sont tout de même prometteurs.

Antonin Martinovitch

Ayant pratiqué le sport pendant près de 15 ans, Antonin Martinovitch mange, dort et respire hockey. Amateur de statistiques avancées, il fait parler les chiffres, montrant le sport sous un angle différent. Étudiant au baccalauréat en journalisme à l’UQÀM ainsi que dictionnaire sur pattes, il transmet sa passion du monde sportif à travers ses écrits et ses chroniques vidéos. Ses divers intérêts à un bas âge au football, au golf et à la Formule 1 ont aussi persisté, faisant de lui avant tout un amateur de sport. « Comment aimeriez-vous un travail où, chaque fois que vous commettez une erreur, une grosse lumière rouge s'allume et 18 000 personnes vous huent ? » – Jacques Plante

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