Violence policière : la NBA n’est pas épargnée

raymondclarkeimages | CC BY-NC 2.0

L’onde de choc des tirs subis par Jacob Blake a entraîné la suspension, mercredi, des matchs de la NBA, dans la foulée du boycottage initié par les Bucks de Milwaukee. À la suite de cette énième bavure policière envers la communauté afro-américaine, peut-on avancer que la NBA prend des décisions sur le coup de l’émotion? Lorsque Lebron James dit : « Nous avons peur », exagère-t-il?

Avec cette nouvelle action, d’aucuns diront que les joueurs de la NBA en font trop. D’ailleurs, le tristement célèbre : « shut up and dribble (tais-toi et dribble) » de la journaliste de Fox News, Laura Ingraham, et les attaques du clan Donald Trump montrent à suffisance qu’il y en a certains qui trouvent que les joueurs de la NBA doivent se contenter de « leur privilège ». Par conséquent, ils ne devraient pas s’immiscer dans les enjeux de la société nord-américaine. Mais, jouissent-ils d’un privilège — si tant est que l’on puisse identifier leur travail et les efforts consentis pour être à ce stade comme tel —?.

En tant que Noirs aux États-Unis, nous avons peur. Hommes, femmes et enfants noirs sont terrifiés. 

Lebron James, quadruple MVP de la NBA.
Des joueurs dans une hantise quotidienne

Cette énième bavure de la police américaine ne se limite pas qu’aux anonymes de la communauté afro-américaine. Ce n’est donc pas fortuitement que l’ailier polyvalent des Lakers de Los Angeles évoque la « peur ». En effet, l’intervention disproportionnée des policiers des États-Unis est présente dans toutes les sphères de cette communauté. Et elle n’épargne pas les acteurs de la NBA.

Fusillé au taser malgré sa coopération

26 janvier 2018, Sterling Brown se fait taser. Le rookie (recrue) des Bucks est appréhendé par la police pour un stationnement illégal. La vidéo de son arrestation montre qu’il n’oppose aucune résistance. Malgré cela, le jeune arrière est plaqué au sol par quatre policiers puis maîtrisé avec un pistolet taser. Il décide de porter plainte contre la ville.

Six mois à l’infirmerie après une interpellation  

Avril 2015. Les joueurs des Hawks d’Atlanta Thabo Sefolosha et Petro Antic sont appréhendés par la police new-yorkaise à la sortie d’une boite de nuit. L’interpellation est si musclée que Sefolosha, Suisse d’origine sud-africaine, passe sur le billard. Il subit une opération pour une rupture du péroné et une déchirure d’un ligament de la cheville. Il ne disputera pas les séries éliminatoires. Au terme d’un long processus judiciaire, il reçoit une indemnité de 4 millions USD et fait don d’une partie à une association.

Menotté sans raison

Je me rends compte aujourd’hui que ce sens de l’urgence que je n’avais pas porte un nom : le privilège blanc.

Lauren Nicole Holiday, ancienne joueuse de soccer professionnel.

Dans la vague des revendications d’une vie meilleure pour les Afro-Américain.es, Lauren Holiday, ex-internationale américaine de soccer, a fait part d’une mésaventure de son mari : Jrue Holiday. Le meneur All-Star a eu les menottes aux poignets alors qu’il n’avait rien fait de répréhensible. Alors qu’elle rentrait d’un entraînement avec sa belle-sœur, Lauren est sifflée par la police. Durant le contrôle, il s’avère qu’elles n’ont pas sur elles leur permis de conduire. Dans sa narration, elle souligne que sa belle-sœur a le réflexe d’appeler Jrue Holiday. Il arrive sur les lieux avec les deux permis de conduire. Mais, à son grand étonnement, dès son arrivée, le policier passe les menottes au meneur des Pelicans, avant de le relâcher quelques minutes plus tard. « Je n’oublierai jamais ce qui s’est produit », souffle-t-elle.  

La colère des Raptors

Jrue Holiday ne mènera aucune action contre le policier. Ce n’est pas le cas pour le directeur général de la franchise canadienne de la NBA : les Raptors de Toronto. Alors qu’il descendait les marches de l’Oracle Arena pour aller féliciter ses joueurs après leur victoire face aux Warriors de Golden State, en juin 2019, durant les finales NBA, Masai Ujiri, Nigérian d’origine, se retrouve malgré lui acteur d’une altercation avec le shérif du comté d’Alameda, Andy Strickland. Poursuivi en justice par le shérif, Ujiri sort de son silence et contre-attaque. À la lumière de la vidéo il décide d’intenter à son tour une poursuite au civil.

On m’a rappelé […] que malgré tout le travail et le succès, il y a certaines personnes, incluant ceux qui sont censés nous protéger, qui vont toujours et seulement voir en moi une personne qui n’est pas digne d’être traitée avec respect.

Masai Ujiri, directeur général des Raptors de Toronto.

Au regard de cet événement, on peut comprendre la position des joueurs des Raptors. En effet, la franchise de Toronto était la première à appeler au boycottage avec les propos assez forts de Fred VanVleet.

L’initiative des joueurs et la position prise par les responsables de la NBA sont saluées par plusieurs sur les réseaux sociaux.

Barack Obama, président des États-Unis de janvier 2009 à janvier 2017, « félicite les joueurs des Bucks d’avoir pris position pour ce en quoi ils croient et les coachs comme Doc Rivers ainsi que la NBA et la WNBA de donner l’exemple. Il faudra que toutes nos institutions défendent nos valeurs ».

La NBA fait donc ce qu’elle pense être juste pour juguler la violence policière et toute forme d’injustice sociale. Le boycottage des matchs devrait être levé sous peu. Selon des indiscrétions, les matchs des séries éliminatoires devraient reprendre vendredi.

Benoît Dosseh

Benoît Dosseh a une passion pour le sport. Il s’est essayé au basketball, au volleyball, à l’athlétisme et au soccer de quartiers (Côte d’Ivoire et Togo), notamment. Après un passage au Collège de Rosemont en Arts, lettres et communication, option médias, il poursuit sa formation en journalisme à l’UQAM. Il a collaboré avec différents médias dont le magazine estudiantin L’Apostrophe.

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