Le ballet : l’envers du décor

Pieds d’une danseuse de rue à New York. Les blessures sur sa peau représentent, de façon métaphorique, la pression et la douleur que ressentent les danseuses. Crédit photo : Cheyenne Ogoyard.

Le monde du ballet, comme beaucoup d’autres, n’est pas toujours tout rose. Ce que vous voyez sur scène n’est que le sommet de l’iceberg, et la pression dont souffrent les danseuses derrière le rideau est un sujet qui n’est pas assez souvent abordé.

Les pressions que ressentent les gens, les filles en particulier, sont présentes dans notre société, et d’autant plus sur le devant de la scène en ce moment, sans mauvais jeu de mot. On le voit beaucoup dans les défilés, les campagnes publicitaires ou simplement sur les réseaux sociaux : la lutte pour l’acceptation de soi et l’inclusivité sont des concepts défendus ardemment. Pourtant, il reste encore beaucoup de chemin à faire et le monde de la danse classique en est un exemple.

Faire du ballet est un sport exigeant physiquement, et d’autant plus qu’il fait intervenir non seulement des critères techniques, mais aussi esthétiques. En effet, le corps est utilisé comme objet d’art si l’on peut dire, c’est ce que le spectateur va voir et ce qui va être mis en scène, et pourtant, ce corps si précieux en danse est la cible d’une pression dangereuse, et cette pression peut parfois mener à des cas de troubles alimentaires, de troubles mentaux, voire plus grave encore, mais peu de statistiques sont disponibles à ce sujet.


Sydney Hall, 21 ans, est une danseuse de ballet. Ayant commencé la danse à l’âge de 5 ans, elle intègre une école professionnelle à l’âge de 14 ans et y reste jusqu’à ses 16 ans. Aujourd’hui, elle pratique uniquement de façon récréative. Elle a accepté de raconter son expérience, et voici son entrevue :

As-tu déjà vécu ou rencontré quelqu’un qui a vécu une pression quelconque dans le milieu de la danse classique?

« Oui. J’ai eu un professeur qui m’a dit que mes cuisses étaient trop grandes. Heureusement, je ne l’ai pas pris trop au sérieux. Personnellement, je n’ai jamais été fortement affectée par la pression d’être maigre en ballet. Mais, j’en ai été témoin [avec] mes amies. Je connaissais des filles de ballet qui se sentaient trop grosses pour être des ballerines et qui pensaient qu’elles ne réussiraient pas en ballet si elles ne perdaient pas de poids. »

Je pense que le simple fait qu’on soit constamment dans un studio plein de miroirs, vêtues d’un maillot et de collants suffit à déclencher des problèmes de dysmorphie corporelle.

Sydney Hall
Que penses-tu de cette pression qu’on met aux filles sur leur apparence lorsqu’elles font du ballet?

« Je pense qu’il y a beaucoup de pression sur les filles pour avoir le « corps parfait ». Je pense que le simple fait qu’on soit constamment dans un studio plein de miroirs, vêtues d’un maillot et de collants suffit à déclencher des problèmes de dysmorphie corporelle.

Quand vous regardez les ballerines professionnelles dans les meilleures compagnies de ballet, presque toutes sont très minces. En tant que jeune danseuse de ballet, il est facile de penser que vous devez avoir ce type de corps pour réussir. Malheureusement, les chances de rentrer dans une compagnie de ballet sont probablement très faibles si tu n’es pas mince. »

Quelles solutions ou aménagements sont nécessaires, selon toi, pour régler ce problème? 

« Je pense que nous avons besoin d’une plus grande représentation des différents types de corps dans les compagnies de ballet. Nous devrions former les professeurs de ballet à ne pas encourager des standards de beauté pour leurs élèves.

Dans les écoles professionnelles, il pourrait être bon d’avoir un professionnel qualifié qui pourrait soutenir les étudiants dans les problèmes de santé mentale, comme les troubles de l’alimentation. »

Y a-t-il une différence entre le haut niveau et la pratique en loisir? 

« Selon moi, oui. Personnellement, je n’avais pas vraiment senti la pression d’être mince avant de rentrer dans une école professionnelle. »


On parle énormément de ce que l’on voit sur les réseaux sociaux, dans les défilés ou simplement dans les magazines. On parle beaucoup de ces stéréotypes et standards de beauté imposés par une société qui tend, espérons le, à changer. Cependant, on parle rarement de l’envers du décor, ce qu’on ne voit pas à la télévision, mais qui est pourtant tout aussi important, voire plus quand on considère que c’est ça, la réalité, et pas ce qui passe par notre fil d’actualité.

Propos recueillis par Cheyenne Ogoyard

Cheyenne Ogoyard

Passionnée par le sport depuis l’enfance, Cheyenne s’est reconnue tout de suite en voyant passer Le Club-École dans son fil d’actualité. Parmi l’une des premières filles à se lancer dans le projet, c’est tout naturellement qu’elle souhaite se diriger vers des sports moins médiatisés. Ayant commencé la danse et l’équitation à l’âge de 4 ans, elle baigne depuis maintenant 10 ans dans le milieu de la compétition équestre au niveau national, avec une médaille aux Championnats de France en saut d’obstacle à son actif. Son but est essentiellement d’écrire et d’apprendre sur des sports comme la danse, l’équitation, la gymnastique ou encore la natation ; des sports plus discrets dans les journaux, mais tout aussi importants.

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