Sixième homme de l’année : Chris Boucher devra être sérieusement considéré

À 28 ans, Boucher connaît, de loin, la meilleure saison de sa jeune carrière dans la NBA. Photo : Toronto Raptors (@Raptors) via Twitter.

Chris Boucher, l’histoire du bambou, voilà le titre du documentaire portant sur sa vie, diffusé en août dernier, à RDS. Pour son entraîneur au Collège d’Alma, Igor Rwigema, Boucher est comparable à cette graminée, qui pousse si rapidement dès sa sortie du sol. Une affirmation qui ne pourrait être plus juste. Le 23 décembre, le bambou a laissé paraître son turion. Depuis, il a su montrer toute sa grandeur.

Seul contentement d’une saison crève-cœur pour les Raptors de Toronto et leurs partisans, Chris Boucher est en train de saisir la chance la plus importante de sa jeune carrière. Rapatrié afin de pallier (un tant soit peu) la perte des Serge Ibaka et Marc Gasol, le centre d’expérience Aron Baynes connaît une saison bien en deçà des attentes, parmi les pires de sa carrière. Au-delà de sa très maigre récolte de 5,3 points par rencontre, Baynes ne réussit que 37,8% de ses tirs, son pourcentage d’efficacité le plus bas dans la NBA, et participe très peu à l’effort défensif, à tel point qu’il n’a toujours pas enregistré de contre après 10 matchs. Âgé de 34 ans, le Néo-Zélandais montre plusieurs signes de ralentissement, au grand désarroi de Masai Ujiri et Bobby Webster, qui lui ont consenti un contrat de deux ans à l’ouverture du marché des joueurs autonomes.

Depuis le début de la saison, Baynes a vu son temps de jeu fondre comme neige au soleil, si bien qu’il a été laissé de côté lors des trois plus récentes parties des Raptors. Tout le contraire de Chris Boucher, qui prouve ainsi que, dans le monde cruel du sport, le malheur des uns fait souvent le bonheur des autres. S’il remplit toujours le rôle de sixième homme, ses minutes le rapprochent de plus en plus du cinq partant.

En seulement trois semaines, le bambou a pris sa place et est plus solide que jamais. Maintenant, il faut lui offrir le traitement qu’il mérite.

Un remplaçant d’exception

Mettons cela au clair tout de suite : Chris Boucher n’a rien à faire sur la deuxième unité. Certes, un centre de sa trempe sur le banc peut assurer la stabilité d’une formation, mais encore faut-il que celle-ci ait une certaine stabilité au départ. Les joueurs torontois jouent à la chaise musicale de défaite en défaite et, alors que les Raptors marquent, en moyenne, 1,4 point de moins que ce qu’ils accordent, l’équipe ne peut se permettre de se priver de l’apport offensif et défensif de Boucher, le troisième joueur le plus efficace de la NBA (27,9 PER), derrière Nikola Jokić et Joel Embiid, selon la cote d’efficacité du joueur de John Hollinger.

Malgré tout, Nick Nurse est têtu, on le sait. Tant que Boucher n’aura pas amélioré sa moyenne de rebonds par match, l’entraîneur-chef des Raptors ne lui fera pas confiance sur l’alignement de départ. Pour ce faire, cependant, Chris Boucher devra prendre du coffre, lui qui est souvent tassé près du filet. Sa titularisation, ce n’est donc probablement pas pour tout de suite.

Entre-temps, le Québécois originaire de Sainte-Lucie peut se réjouir de voir son nom dans la course au trophée du sixième homme de l’année dans la NBA. Toutefois, selon le site web BettingPros, qui amalgame les cotes de plusieurs sites de pari sportif pour en arriver à un consensus, Boucher ne serait présentement qu’au neuvième rang des joueurs pouvant espérer conclure la saison avec cette statuette à la main, une position qui semble très basse, considérant les performances de l’intérieur de 28 ans.

Un joueur complet

Avant celui de Chris Boucher défilent tour à tour les noms de Jordan Clarkson, Caris LeVert, Goran Dragić, Terrence Ross, Montrezl Harrell, Lou Williams, Bogdan Bogdanović et Danilo Gallinari, dont les statistiques ne seront pas prises en compte ici, lui qui a raté 8 des 10 matchs de son club en raison d’une blessure. Pourtant, jusqu’à maintenant, seuls deux de ces joueurs ont une meilleure moyenne de points par 36 minutes que celle de Boucher, qui est de 23,2. Il s’agit de Clarkson et LeVert, dont les moyennes sont de 25,5 et 23,9 respectivement.

En ce qui a trait à l’efficacité offensive globale, uniquement Lou Williams et Goran Dragić peuvent se vanter de faire de l’ombre à Chris Boucher. Sur 100 possessions, les deux gardes affichent une moyenne respective de 117,4 et 116,8 points engendrés.


Williams se signale également pour l’aspect défensif de son jeu. Une fois de plus, le vétéran de 16 saisons est le plus efficace du groupe (116,4 points accordés sur 100 possessions). Sauf qu’une fois de plus, Chris Boucher fait sentir sa présence dans le top 3. Par son travail près du panier, le centre limite grandement les dégâts infligés aux Raptors de Toronto. Après s’être fait reprocher par Nick Nurse de ne pas réagir assez rapidement en transition défensive, Boucher manifeste désormais une excellente lecture du jeu, qui l’aide à mieux se positionner et à presser le porteur du ballon, parfois même à la ligne des trois points. Devenu le remplaçant légitime de Serge Iblocka, Chris Boucher obtient ainsi 2,6 blocs en moyenne par match, ce qui le place au troisième rang de la ligue à ce niveau, à égalité avec l’excellent Rudy Gobert, double récipiendaire du trophée du joueur défensif de l’année.


Au neuvième rang?

Évidemment, les deux statistiques présentées plus haut ne sont pas suffisantes pour en arriver à une conclusion irrévocable. Dépendamment de la situation de leur équipe et de leur position sur le parquet, certains joueurs analysés dans cet article peuvent se concentrer sur un seul aspect du jeu, en négligeant quelque peu l’autre. C’est ce qui peut expliquer que Jordan Clarkson soit le pire défenseur du groupe, tout en ayant le plus de chances de remporter le trophée (le Jazz a la sixième meilleure défense de la ligue).

Le cas de Chris Boucher reste tout de même intéressant. Au sein d’une formation qui présente des lacunes inquiétantes en attaque et en défense, qui se retrouve dans la deuxième moitié de la ligue en termes de points marqués et de points accordés, Boucher arrive à tirer son épingle du jeu. Dans les deux territoires, le Montréalais fait partie des trois meilleurs remplaçants.

Ceci étant dit, ces deux statistiques entraînent une hypothèse intéressante, selon laquelle Lou Williams et Chris Boucher seraient les deux joueurs les plus complets qui sont présentement dans la course au titre de sixième homme de l’année. Une simple confirmation du grand talent de Williams, qui traîne un lourd bagage d’expérience dans la meilleure ligue de basketball au monde, mais une véritable révélation pour l’intérieur québécois.

Cette révélation mérite d’être honorée. Au moment d’écrire ces lignes, il est trop tôt pour décerner à Chris Boucher le titre de joueur s’étant le plus amélioré. Boucher étant assis sur le banc pendant près de 26 minutes par rencontre, sa progression ne peut présentement rivaliser avec celle de Christian Wood et Michael Porter Jr. notamment.

Néanmoins, à la lumière de cette analyse, pour le trophée du sixième homme de l’année, Chris Boucher devra être sérieusement considéré.

Jérémy Labrie

Ayant contribué à quelques médias sportifs amateurs au cours de son adolescence, Jérémy Labrie intègre, en 2017, l'option Médias du programme d'Arts, lettres et communication du Cégep Édouard-Montpetit avec une connaissance accrue du journalisme web. Maintenant étudiant en journalisme à l'Université du Québec à Montréal, il met son expérience au service du Club-École pour en faire une source d'information fiable et de qualité. Il a auparavant collaboré à deux reprises avec le pupitre sport du magazine étudiant L'Apostrophe. S'intéressant tout de même à la majorité des sports couverts par Le Club-École, il se spécialise dans le hockey et le basketball.

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